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"Un homme n'est jamais tout à fait mort tant qu'il y a quelqu'un pour prononcer son nom" Antoine de SAINT-EXUPÉRY
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Citations…

"Un homme n'est jamais tout à fait mort tant qu'il y a quelqu'un pour prononcer son nom"

Antoine de SAINT-EXUPÉRY

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Par Patrice LUCQUIAUD, le lundi 23 novembre 2009

Puipastrop

J'aime et je partage...

VII

PUIPASTROP

———u——-

Peupastrop ou Puipastrop ou Pui-pas-trop, est aujourd’hui un village composé de quelques petites maisons occupées par leurs propriétaires et de trois grandes fermes appartenant à Madame de Montjou.

La ferme des Granges est sans caractère et sans histoire, comme les autres maisons du Peupastrop. La ferme dite la Petite-Métairie n’a laissé de trace dans l’histoire qu’à l’époque de la Terreur, où le fermier Colas dénonça au district de Ruffec ses maîtres comme soupçonnés d’émigration. (60)

Seule la ferme dite le Logis présente quelque intérêt au visiteur curieux d’histoire locale.

De l’ancienne construction élevée sur un coteau dominant la Charente, il ne subsiste plus qu’un corps de bâtiments. Il n’a de remarquable que ses gargouilles,(61) ses vastes fenêtres éclairant de vastes salles qui reposent sur de magnifiques caves voûtées en ogive (a).

(a) Ces caves, comblées aujourd’hui jusqu’à la naissance des voûtes, sont probablement les restes d’une construction antérieure qui a fait place aux bâtiments actuels.

Cette construction est desservie par l’escalier en pierre de la construction primitive. A côté de cet escalier règne une espèce de cage rectangulaire qui, partant de l’étage supérieur, descendait à 15 mètres au-dessous du niveau du sol, dit le fermier qui l’a comblée récemment. On a voulu y voir des oubliettes alors que ne ce fut dans cette construction du XVIe siècle qu’un égoût recevant l’eau de l’habitation et de la cour inclinée vers ce puits perdu.

A l’ancienne construction, dont une aile a été détruite en partie, on a ajouté, pour les besoins de la ferme, des constructions vulgaires qui en modifient l’aspect général.

La cour possède un sully (62) de forte taille qui tombe de vétusté.

Par qui furent élevées les constructions dont il ne reste plus aujourd’hui qu’une partie? Il est à peu près certain que ce fut par les Templiers de Villegast,(63) qui avaient bâti aussi, pense-t-on, l’église de Lizant. Ils n’étaient pas les premiers à s’installer à Puipastrop, car on lit dans Dom Fonteneau (Tome XVIII, pages 363 et 577) :

Vers 1166, notice d’un don de quelques prés fait au monastère de Montazais par Geoffroy, clerc de Puipastrop et Peatgers de Ruffec.

Vers 1187, don fait au monastère de Montazais, par Guillaume de la Porte, de tout ce qui lui appartient dans la dixme de Genoillé et d’un prébendier de froment à Poipautrop.

C’est Genouillé et Puipastrop qu’il faut lire évidemment.

Quand les chevaliers de Villegast ont-il vendu Puipastrop? Après la dévastation causée par les protestants, maîtres de Ruffec, les Templiers se défirent probablement de Puipastrop. C’est ainsi que nous trouvons ce bien entre les mains de la famille Jay. C’était une vieille famille du pays en possession de Boisseguin depuis longtemps. En exécution du traité de Brétigny, on trouve un Jean Jay prêtant obéissance à l’anglais Jean Chandos à Ruffec, en 1361.

Une note de la Bibliothèque nationale nous montre les moines de Nanteuil en rapport avec Ithier Jay, seigneur de Boisseguin en 1405.

Un peu plus tard, en 1477, Aymery Texier, abbé de Nanteuil, règle des affaires litigieuses avec Jean Jay.

En 1550, Jean Jay, escuyer seigneur de Boisseguin, rend aveu pour son hébergement de Nieullet au commandeur de Civray.

Vers 1600, la famille Jay étant déchue de son ancienne splendeur vendit la seigneurie de Boisseguin à Philippe de Volvire, fils aîné de Philippe de Volvire et d’Anne de Daillon de Lude, qui avait acheté Aizie en 1584.

Ce Philippe de Volvire,(64) le premier des Volvire qui ait pris le titre de seigneur de Boisseguin, mourut tué en duel le 19 août 1604.

Les Volvire transmirent par alliance et par héritage aux Durfort de Lorges la terre de Boisseguin (a).

(a) On trouve aux archives de la Vienne (série C, 412) un hommage du 27 mars 1711 rendu au Roi à cause de son château de Civray, par Guy Durfort, duc de Quintin, comte de Lorges, seigneur de Boisseguin, à cause de son fief de Boisseguin, situé paroisse de Lizant…ayant droit de haute justice…relevant du château de Civray à foi et hommage lige au devoir de sept livres 10 sols à muance de seigneur et d’homme…qu’il possède à titre de substitution et de cession de Mme la Maréchale de Lorges, sa mère…

Le 12 octobre 1737, Guy-Michel de Durfort de Lorges, duc de Randan, lieutenant-général pour le roi au comté de Bourgogne, rend hommage au château de Civray pour son fief de Boisseguin.

Le 16 mai 1775, Louis Durfort, duc de Lorges, rend hommage à son tour au château de Civray pour son fief de Boisseguin.

A l’époque où la famille Jay vendit (vers 1600) Boisseguin aux Volvire, elle prenait possession du fief de Puipastrop qu’elle venait d’acheter aux Templiers de Villegats, car aux archives de la Vienne (série C n° 430), on trouve plusieurs aveux et hommages rendus au château de Civray par les descendants de cette famille pour ce fief.

A la date du 10 juillet 1623, c’est Louis Jay, escuyer, seigneur de Moutonneau et de Puipastrop, qui rend hommage. « La maison noble de Puipastrop, dit cet aveu ainsi que les suivants, est située paroisse de Taizé, en Angoumois, ayant droit de moyenne justice, relevant à foy et hommage lige du château de Civray, au devoir de dix sols d’achat à mutation de seigneur… »

Dans le procès-verbal de l’assemblée du ban et arrière-ban (65) de la noblesse d’Angoumois en 1635, on voit que Regné Jay, escuyer sieur de Puispatrop, fut admis à servir au lieu et place de Louis Jay, sieur de Moutonneau, et de Bourdelaye, son père.

En 1692, la famille Jay possédait encore le fief de Puipastrop par descendants masculins, car le 15 mars 1672, René Jay, chevalier seigneur de Moutonneau, rend aveu avec offre d’hommage au château de Civray pour son fief de Puipastrop.

En 1716, le fief de Puipastrop passa par mariage à Charles-Louis-Henri Bouchard d’Esparbès de Lussan, marquis d’Aubeterre (b) qui, le 4 mai 1776, rend aveu au château de Civray à cause de la cession en contrat de mariage à lui faite par son beau-père N…Jay, de la terre de Puipastrop.

(b) Ce Henri Bouchard d’Esparbès, marquis d’Aubeterre, était le descendant d’une ancienne et puissante famille de l’Angoumois.

On sait, en effet que Jacques de Montbron, gendre de Renaud Maulevrier et de Béatrix de Craon, séneschal d’Angoumois, maréchal de France, mort en 1422, avait marié une de ses filles, Marguerite, à Savary Bouchard d’Aubeterre, fils de Gui Bouchard et de Jeanne Chenin (mariés vers 1380). On sait aussi que plus tard, en 1594, Jacquette de Montbron, dame d’honneur de Marie de Médicis et épouse d’André, seigneur de Bourdeille, La Tour Blanche, Archiac et Matha, énumère dans son testament, parmi ses enfants, Renée de Bourdeille, mariée à David Bouchard d’Aubeterre, dont un frère, Charles Bouchard, fut abbé de Saint-Cybard, à Angoulême, et testa en 1595.

Ce David Bouchard, gouverneur du Périgord, tué devant l’Isle, le 10 août 1593, ne laissa qu’une fille, Hippolyte, mariée le 15 avril 1597 à François d’Esparbès, seigneur de Lussan, auquel elle porta la terre d’Aubeterre. Leurs enfants furent substitués aux noms et armes des Bouchard d’Aubeterre.

D’après le P. Anselme, les Bouchard d’Aubeterre portaient « écartelé au 1 et 4 de gueule à trois léopards d’or », qui est Bouchard; « au 2 et 3 losangé d’or et d’azur, au chef de gueule, » qui est Raymond d’Aubeterre.

Marie-Anne-Françoise Jay, dame de Moutonneau et de Puipastrop, devenue veuve de Charles-Henri Bouchard, marquis d’Aubeterre, rentra en jouissance de son fief de Puipastrop et en rendit aveu et hommage au château de Civray, le 11 juillet 1740 et le 15 mai 1745.

Joseph-Henri Bouchard d’Esparbès, marquis d’Aubeterre, chevalier des ordres du Roi, ancien ambassadeur, devenu par la mort de sa mère, Marie-Anne-Françoise Jay, possesseur du fief de Puipastrop, en rendit hommage et aveu le 23 février 1775 et le 5 décembre 1776, puis vendit Puipastrop en 1782 à César-Louis de Choiseul-Praslin, déjà propriétaire de Boisseguin.

Le bureau des finances, le 20 février 1783, rendit une ordonnance conformément à l’acte présenté par César Louis de Choiseul, mareschal des camps et armées du roi, ci-devant son ambassadeur à Naples, fixant à 7,446 livres 3 sols 5 deniers les droits de lots et vente dûs au comte d’Artois pour la vente de la seigneurie de Puipastrop, consentie au profit de ce vicomte par Joseph Henri Bouchard d’Esparbès de Lussan, marquis d’Aubeterre, le 19 octobre 1782. Voilà pourquoi nous retrouverons à la Révolution, Puipastrop entre les mains de la famille Choiseul-Praslin, héritière des Durfort de Lorges, propriétaires de Boisseguin depuis longtemps, par alliance avec les Volvire.

Dans les registres de l’Etat religieux de Taizé, on lit:

7 janvier 1734, mariage de Pierre Jeoffroy, fermier de la terre seigneuriale de Puipastrop, avec Catherine Lebrun, fille du sieur Pierre Lebrun, directeur des forges d’Aizie.

Ils eurent pour enfants:

Le 10 octobre 1734: Catherine Jeoffroy;

Le 31 décembre 1735: Anne Jeoffroy;

Le 25 janvier 1737: Pierre-André Jeoffroy.

On trouve la mention des funérailles d’Anne Jeoffroy le 11 septembre 1739 et, le 25 décembre 1746, l’enterrement de Marie Jeoffroy, filles de Pierre Jeoffroy et de Catherine Lebrun.

Le 24 décembre 1755, inhumation dans l’église de Taizé de Pierre Jeoffroy, fermier de Peupastrop, âgé de 46 ans; en présence de Guillaudin, curé de Ruffec, de Garnier, curé de Condac; et de Chaigneau, prieur de Taizé.

A la révolution, les héritiers Choiseul-Praslin furent soupçonnés d’avoir émigré, et malgré un certificat de résidence qu’ils envoyèrent, mais qui manquait de la signature du district où se trouvait leur résidence, leurs biens furent mis sous séquestres et les vastes bâtiments de Peupastrop servirent de greniers nationaux pour les grains récoltés sur la propriété ou réquisitionnés dans les environs. Nous lisons dans les archives de Taizé à la date du 5 vendémiaire, an III:

Nous, maire et officiers municipaux, en exécution de l’ordre du comité révolutionnaire de Ruffec, nous nous sommes transportés au domicile de Pierre Colas, colon à la petite métairie (de Puipastrop), provenant de la succession Choiseul-Praslin, à l’effet d’apposer les scellés sur les meubles et effets en provenant et s’emparer des assignats pour les transmettre au receveur de l’enregistrement de Ruffec.

C’est ce qui fut d’ailleurs fait à la demande de Pierre Colas, qui lui-même avait élevé des soupçons sur l’émigration de ses maîtres, comme en témoigne sa dénonciation encore aux archives.

Le 11 avril 1793, les officiers municipaux de Taizé-Aizie exposent au district de Ruffec que depuis le 2 janvier dernier, les scellés sont apposés sur les portes d’entrée des greniers dépendant de la maison de Puipastrop, faisant partie de la succession Choiseul-Praslin, et que sous prétexte que les propriétaires de cette succession ne sont point émigrés, les scellés n’ont point été levés. Cependant la récolte de 1792 ayant été faite par des temps pluvieux, les grains exigeraient des soins extraordinaires et n’en ont reçu aucun, en sorte que les blés d’Espagne sont presque entièrement pourris et peut-être même les autres grains sont endommagés.

De plus, il existe deux journaux de pré qui ne font point partie de l’affenage des métairies et une vigne de réserve contenant trois journaux et demi, qui sont d’une valeur considérable. Ces objets ne doivent pas et ne peuvent pas être négligés sans une perte certaine.

Les officiers municipaux demandent donc, tant pour l’intérêt de la République que pour celui des héritiers Choiseul-Praslin, s’ils ne sont pas émigrés, qu’il soit procédé à la reconnaissance desdits scellés et que les soins que peuvent exiger les grains dont il est question leur soient donnés et que le bail desdits pré et vigne soit fait.

Ces biens, longtemps séquestrés, ne furent cependant pas vendus et après la tourmente révolutionnaire, ils se retrouvent entre les mains des héritiers Choiseul-Praslin, comme en témoignent les passages suivants des papiers de Boistillet:

Le 2 septembre 1827, par acte passé en l’étude de maître Hastron, notaire à Couhé, son excellence, Mgr Ange-Iacinthe-Maxence, baron de Damas, pair de France, ministre, secrétaire d’Etat au département des affaires étrangères, et Mme Sigismonde-Charlotte-Laure d’Hautefort, baronne de Damas, son épouse, demeurant à Paris, en l’hôtel du ministère des affaires étrangères; par procuration donnée au château de Vaucresson (Seine-et-Oise), le 12 juin 1827, vendirent à M. Jean-Baptiste Mimaud-Grandchamp, maire de Taizé-Aizie et propriétaire, demeurant à Boistillet:

1° Une pièce de terre labourable, dite la Vallée-Brousse, commune de Taizé-Aizie;

2° Une pièce de terre labourable, dite le Champ-de-la-Croix, commune de Taizé-Aizie;

3° Une pièce de terre en labour, dite le Chaintrez, commune de Taizé-Aizie;

4° Un pré de rivière situé dans la prairie de Cheptier;

5° Un autre pré situé dans la même prairie;

6° Une pièce de terre appelée le Grand-Champ, dont partie en bruyère, dite la Chataigneraie des granges, et l’autre partie en labour.

Les immeubles ci-dessus désignés dépendent des terres de Boisseguin et de Puipastrop.

Aux pièces justificatives de cette vente, on lit:

M. et Mme de Damas se sont mariés sous le régime total; mais par l’article 5 de leur contrat de mariage, passé en minute devant Péan de Saint-Gilles, les 6 et 7 juin 1817, la future épouse s’est réservée expressément la faculté d’aliéner, sous l’autorisation de son mari, les terres de Boisseguin et de Puipastrop, provenant de la succession de Mme la duchesse de Praslin, aïeule de Mme la baronne de Damas, et acquise sur la licitation poursuivie entre elle et ses co-héritiers, suivant procès-verbal reçu par maître Trutat, notaire à Paris, le 4 juillet 1809; devenues la propriété de Mme Sigismonde-Charlotte-Laure d’Hautefort, actuellement baronne de Damas, en vertu de l’acte déclaratif passé le 5 juillet 1809 devant maître Trutat.

Mme de Damas s’est libérée du prix de ces deux terres envers ses co-héritiers, en vertu de l’acte portant liquidation et partage de la succession de Mme Guyonne- Marguerite- Philippe Durfort de Lorges, décédée, veuve de Regnault-César-Louis de Choiseul-Praslin; ledit acte rédigé le 21 août 1810.

Le vendeur est dit nous déclarer que les titres de propriété concernant le domaine de Puipastrop ont été remis au sieur Jean-Claude Quéron, acquéreur de ce domaine, lequel s’est obligé à en donner communication à M. Mimaud-Grandchamp toutes les fois que celui-ci en aura besoin.

Ces documents démontrent que l’antique famille Jay posséda longtemps Boisseguin, puis vers 1600 vendit ce domaine aux Volvire et acheta Puipastrop. Elle demeura en possession de ce dernier fief jusqu’en 1783 où Joseph Henri Bouchard d’Esparbès de Lussan, héritier par sa mère de la famille Jay, vendit à son tour Puipastrop à César-Louis de Choiseul-Praslin, déjà en possession du domaine de Boisseguin par alliances et héritages des Durfort de Lorges, qui eux-mêmes, le tenaient des Volvire.

Ces terres passèrent par héritage à Madame Sigismonde-Charlotte-Laure d’Hautefort, une des petites-filles de Madame de Choiseul-Praslin. Après son mariage avec le baron de Damas, ils vendirent ces terres en détail vers 1827.

Un sieur Jean-Claude Queron fut acquéreur du domaine de Puipastrop; il le garda peu de temps et le vendit à la famille d’Hémery, qui le possède encore en la personne de Madame de Montjou, née d’Hémery.

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Suite de cet article : Les Forges d’Aizie
VII

PUIPASTROP

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Peupastrop ou Puipastrop ou Pui-pas-trop, est aujourd’hui un village composé de quelques petites maisons occupées par leurs propriétaires et de trois grandes fermes appartenant à Madame de Montjou.
La ferme des Granges est sans caractère et sans histoire, comme les autres maisons du Peupastrop. La ferme dite la Petite-Métairie n’a laissé de trace dans l’histoire qu’à l’époque de la Terreur, où le fermier Colas dénonça au district de Ruffec ses maîtres comme soupçonnés d’émigration. (60)
Seule la ferme dite le Logis présente quelque intérêt au visiteur curieux d’histoire locale.
De l’ancienne construction élevée sur un coteau dominant la Charente, il ne subsiste plus qu’un corps de bâtiments. Il n’a de remarquable que ses gargouilles,(61) ses vastes fenêtres éclairant de vastes salles qui reposent sur de magnifiques caves voûtées en ogive (a).
(a) Ces caves, comblées aujourd’hui jusqu’à la naissance des voûtes, sont probablement les restes d’une construction antérieure qui a fait place aux bâtiments actuels.
Cette construction est desservie par l’escalier en pierre de la construction primitive. A côté de cet escalier règne une espèce de cage rectangulaire qui, partant de l’étage supérieur, descendait à 15 mètres au-dessous du niveau du sol, dit le fermier qui l’a comblée récemment. On a voulu y voir des oubliettes alors que ne ce fut dans cette construction du XVIe siècle qu’un égoût recevant l’eau de l’habitation et de la cour inclinée vers ce puits perdu.
A l’ancienne construction, dont une aile a été détruite en partie, on a ajouté, pour les besoins de la ferme, des constructions vulgaires qui en modifient l’aspect général.
La cour possède un sully (62) de forte taille qui tombe de vétusté.
Par qui furent élevées les constructions dont il ne reste plus aujourd’hui qu’une partie? Il est à peu près certain que ce fut par les Templiers de Villegast,(63) qui avaient bâti aussi, pense-t-on, l’église de Lizant. Ils n’étaient pas les premiers à s’installer à Puipastrop, car on lit dans Dom Fonteneau (Tome XVIII, pages 363 et 577) :
Vers 1166, notice d’un don de quelques prés fait au monastère de Montazais par Geoffroy, clerc de Puipastrop et Peatgers de Ruffec.
Vers 1187, don fait au monastère de Montazais, par Guillaume de la Porte, de tout ce qui lui appartient dans la dixme de Genoillé et d’un prébendier de froment à Poipautrop.
C’est Genouillé et Puipastrop qu’il faut lire évidemment.
Quand les chevaliers de Villegast ont-il vendu Puipastrop? Après la dévastation causée par les protestants, maîtres de Ruffec, les Templiers se défirent probablement de Puipastrop. C’est ainsi que nous trouvons ce bien entre les mains de la famille Jay. C’était une vieille famille du pays en possession de Boisseguin depuis longtemps. En exécution du traité de Brétigny, on trouve un Jean Jay prêtant obéissance à l’anglais Jean Chandos à Ruffec, en 1361.
Une note de la Bibliothèque nationale nous montre les moines de Nanteuil en rapport avec Ithier Jay, seigneur de Boisseguin en 1405.
Un peu plus tard, en 1477, Aymery Texier, abbé de Nanteuil, règle des affaires litigieuses avec Jean Jay.
En 1550, Jean Jay, escuyer seigneur de Boisseguin, rend aveu pour son hébergement de Nieullet au commandeur de Civray.
Vers 1600, la famille Jay étant déchue de son ancienne splendeur vendit la seigneurie de Boisseguin à Philippe de Volvire, fils aîné de Philippe de Volvire et d’Anne de Daillon de Lude, qui avait acheté Aizie en 1584.
Ce Philippe de Volvire,(64) le premier des Volvire qui ait pris le titre de seigneur de Boisseguin, mourut tué en duel le 19 août 1604.
Les Volvire transmirent par alliance et par héritage aux Durfort de Lorges la terre de Boisseguin (a).
(a) On trouve aux archives de la Vienne (série C, 412) un hommage du 27 mars 1711 rendu au Roi à cause de son château de Civray, par Guy Durfort, duc de Quintin, comte de Lorges, seigneur de Boisseguin, à cause de son fief de Boisseguin, situé paroisse de Lizant…ayant droit de haute justice…relevant du château de Civray à foi et hommage lige au devoir de sept livres 10 sols à muance de seigneur et d’homme…qu’il possède à titre de substitution et de cession de Mme la Maréchale de Lorges, sa mère…
Le 12 octobre 1737, Guy-Michel de Durfort de Lorges, duc de Randan, lieutenant-général pour le roi au comté de Bourgogne, rend hommage au château de Civray pour son fief de Boisseguin.
Le 16 mai 1775, Louis Durfort, duc de Lorges, rend hommage à son tour au château de Civray pour son fief de Boisseguin.
A l’époque où la famille Jay vendit (vers 1600) Boisseguin aux Volvire, elle prenait possession du fief de Puipastrop qu’elle venait d’acheter aux Templiers de Villegats, car aux archives de la Vienne (série C n° 430), on trouve plusieurs aveux et hommages rendus au château de Civray par les descendants de cette famille pour ce fief.
A la date du 10 juillet 1623, c’est Louis Jay, escuyer, seigneur de Moutonneau et de Puipastrop, qui rend hommage. « La maison noble de Puipastrop, dit cet aveu ainsi que les suivants, est située paroisse de Taizé, en Angoumois, ayant droit de moyenne justice, relevant à foy et hommage lige du château de Civray, au devoir de dix sols d’achat à mutation de seigneur… »
Dans le procès-verbal de l’assemblée du ban et arrière-ban (65) de la noblesse d’Angoumois en 1635, on voit que Regné Jay, escuyer sieur de Puispatrop, fut admis à servir au lieu et place de Louis Jay, sieur de Moutonneau, et de Bourdelaye, son père.
En 1692, la famille Jay possédait encore le fief de Puipastrop par descendants masculins, car le 15 mars 1672, René Jay, chevalier seigneur de Moutonneau, rend aveu avec offre d’hommage au château de Civray pour son fief de Puipastrop.
En 1716, le fief de Puipastrop passa par mariage à Charles-Louis-Henri Bouchard d’Esparbès de Lussan, marquis d’Aubeterre (b) qui, le 4 mai 1776, rend aveu au château de Civray à cause de la cession en contrat de mariage à lui faite par son beau-père N…Jay, de la terre de Puipastrop.
(b) Ce Henri Bouchard d’Esparbès, marquis d’Aubeterre, était le descendant d’une ancienne et puissante famille de l’Angoumois.
On sait, en effet que Jacques de Montbron, gendre de Renaud Maulevrier et de Béatrix de Craon, séneschal d’Angoumois, maréchal de France, mort en 1422, avait marié une de ses filles, Marguerite, à Savary Bouchard d’Aubeterre, fils de Gui Bouchard et de Jeanne Chenin (mariés vers 1380). On sait aussi que plus tard, en 1594, Jacquette de Montbron, dame d’honneur de Marie de Médicis et épouse d’André, seigneur de Bourdeille, La Tour Blanche, Archiac et Matha, énumère dans son testament, parmi ses enfants, Renée de Bourdeille, mariée à David Bouchard d’Aubeterre, dont un frère, Charles Bouchard, fut abbé de Saint-Cybard, à Angoulême, et testa en 1595.
Ce David Bouchard, gouverneur du Périgord, tué devant l’Isle, le 10 août 1593, ne laissa qu’une fille, Hippolyte, mariée le 15 avril 1597 à François d’Esparbès, seigneur de Lussan, auquel elle porta la terre d’Aubeterre. Leurs enfants furent substitués aux noms et armes des Bouchard d’Aubeterre.
D’après le P. Anselme, les Bouchard d’Aubeterre portaient « écartelé au 1 et 4 de gueule à trois léopards d’or », qui est Bouchard; « au 2 et 3 losangé d’or et d’azur, au chef de gueule, » qui est Raymond d’Aubeterre.
Marie-Anne-Françoise Jay, dame de Moutonneau et de Puipastrop, devenue veuve de Charles-Henri Bouchard, marquis d’Aubeterre, rentra en jouissance de son fief de Puipastrop et en rendit aveu et hommage au château de Civray, le 11 juillet 1740 et le 15 mai 1745.
Joseph-Henri Bouchard d’Esparbès, marquis d’Aubeterre, chevalier des ordres du Roi, ancien ambassadeur, devenu par la mort de sa mère, Marie-Anne-Françoise Jay, possesseur du fief de Puipastrop, en rendit hommage et aveu le 23 février 1775 et le 5 décembre 1776, puis vendit Puipastrop en 1782 à César-Louis de Choiseul-Praslin, déjà propriétaire de Boisseguin.
Le bureau des finances, le 20 février 1783, rendit une ordonnance conformément à l’acte présenté par César Louis de Choiseul, mareschal des camps et armées du roi, ci-devant son ambassadeur à Naples, fixant à 7,446 livres 3 sols 5 deniers les droits de lots et vente dûs au comte d’Artois pour la vente de la seigneurie de Puipastrop, consentie au profit de ce vicomte par Joseph Henri Bouchard d’Esparbès de Lussan, marquis d’Aubeterre, le 19 octobre 1782. Voilà pourquoi nous retrouverons à la Révolution, Puipastrop entre les mains de la famille Choiseul-Praslin, héritière des Durfort de Lorges, propriétaires de Boisseguin depuis longtemps, par alliance avec les Volvire.
Dans les registres de l’Etat religieux de Taizé, on lit:
7 janvier 1734, mariage de Pierre Jeoffroy, fermier de la terre seigneuriale de Puipastrop, avec Catherine Lebrun, fille du sieur Pierre Lebrun, directeur des forges d’Aizie.
Ils eurent pour enfants:
Le 10 octobre 1734: Catherine Jeoffroy;
Le 31 décembre 1735: Anne Jeoffroy;
Le 25 janvier 1737: Pierre-André Jeoffroy.
On trouve la mention des funérailles d’Anne Jeoffroy le 11 septembre 1739 et, le 25 décembre 1746, l’enterrement de Marie Jeoffroy, filles de Pierre Jeoffroy et de Catherine Lebrun.
Le 24 décembre 1755, inhumation dans l’église de Taizé de Pierre Jeoffroy, fermier de Peupastrop, âgé de 46 ans; en présence de Guillaudin, curé de Ruffec, de Garnier, curé de Condac; et de Chaigneau, prieur de Taizé.
A la révolution, les héritiers Choiseul-Praslin furent soupçonnés d’avoir émigré, et malgré un certificat de résidence qu’ils envoyèrent, mais qui manquait de la signature du district où se trouvait leur résidence, leurs biens furent mis sous séquestres et les vastes bâtiments de Peupastrop servirent de greniers nationaux pour les grains récoltés sur la propriété ou réquisitionnés dans les environs. Nous lisons dans les archives de Taizé à la date du 5 vendémiaire, an III:
Nous, maire et officiers municipaux, en exécution de l’ordre du comité révolutionnaire de Ruffec, nous nous sommes transportés au domicile de Pierre Colas, colon à la petite métairie (de Puipastrop), provenant de la succession Choiseul-Praslin, à l’effet d’apposer les scellés sur les meubles et effets en provenant et s’emparer des assignats pour les transmettre au receveur de l’enregistrement de Ruffec.
C’est ce qui fut d’ailleurs fait à la demande de Pierre Colas, qui lui-même avait élevé des soupçons sur l’émigration de ses maîtres, comme en témoigne sa dénonciation encore aux archives.
Le 11 avril 1793, les officiers municipaux de Taizé-Aizie exposent au district de Ruffec que depuis le 2 janvier dernier, les scellés sont apposés sur les portes d’entrée des greniers dépendant de la maison de Puipastrop, faisant partie de la succession Choiseul-Praslin, et que sous prétexte que les propriétaires de cette succession ne sont point émigrés, les scellés n’ont point été levés. Cependant la récolte de 1792 ayant été faite par des temps pluvieux, les grains exigeraient des soins extraordinaires et n’en ont reçu aucun, en sorte que les blés d’Espagne sont presque entièrement pourris et peut-être même les autres grains sont endommagés.
De plus, il existe deux journaux de pré qui ne font point partie de l’affenage des métairies et une vigne de réserve contenant trois journaux et demi, qui sont d’une valeur considérable. Ces objets ne doivent pas et ne peuvent pas être négligés sans une perte certaine.
Les officiers municipaux demandent donc, tant pour l’intérêt de la République que pour celui des héritiers Choiseul-Praslin, s’ils ne sont pas émigrés, qu’il soit procédé à la reconnaissance desdits scellés et que les soins que peuvent exiger les grains dont il est question leur soient donnés et que le bail desdits pré et vigne soit fait.
Ces biens, longtemps séquestrés, ne furent cependant pas vendus et après la tourmente révolutionnaire, ils se retrouvent entre les mains des héritiers Choiseul-Praslin, comme en témoignent les passages suivants des papiers de Boistillet:
Le 2 septembre 1827, par acte passé en l’étude de maître Hastron, notaire à Couhé, son excellence, Mgr Ange-Iacinthe-Maxence, baron de Damas, pair de France, ministre, secrétaire d’Etat au département des affaires étrangères, et Mme Sigismonde-Charlotte-Laure d’Hautefort, baronne de Damas, son épouse, demeurant à Paris, en l’hôtel du ministère des affaires étrangères; par procuration donnée au château de Vaucresson (Seine-et-Oise), le 12 juin 1827, vendirent à M. Jean-Baptiste Mimaud-Grandchamp, maire de Taizé-Aizie et propriétaire, demeurant à Boistillet:
1° Une pièce de terre labourable, dite la Vallée-Brousse, commune de Taizé-Aizie;
2° Une pièce de terre labourable, dite le Champ-de-la-Croix, commune de Taizé-Aizie;
3° Une pièce de terre en labour, dite le Chaintrez, commune de Taizé-Aizie;
4° Un pré de rivière situé dans la prairie de Cheptier;
5° Un autre pré situé dans la même prairie;
6° Une pièce de terre appelée le Grand-Champ, dont partie en bruyère, dite la Chataigneraie des granges, et l’autre partie en labour.
Les immeubles ci-dessus désignés dépendent des terres de Boisseguin et de Puipastrop.
Aux pièces justificatives de cette vente, on lit:
M. et Mme de Damas se sont mariés sous le régime total; mais par l’article 5 de leur contrat de mariage, passé en minute devant Péan de Saint-Gilles, les 6 et 7 juin 1817, la future épouse s’est réservée expressément la faculté d’aliéner, sous l’autorisation de son mari, les terres de Boisseguin et de Puipastrop, provenant de la succession de Mme la duchesse de Praslin, aïeule de Mme la baronne de Damas, et acquise sur la licitation poursuivie entre elle et ses co-héritiers, suivant procès-verbal reçu par maître Trutat, notaire à Paris, le 4 juillet 1809; devenues la propriété de Mme Sigismonde-Charlotte-Laure d’Hautefort, actuellement baronne de Damas, en vertu de l’acte déclaratif passé le 5 juillet 1809 devant maître Trutat.
Mme de Damas s’est libérée du prix de ces deux terres envers ses co-héritiers, en vertu de l’acte portant liquidation et partage de la succession de Mme Guyonne- Marguerite- Philippe Durfort de Lorges, décédée, veuve de Regnault-César-Louis de Choiseul-Praslin; ledit acte rédigé le 21 août 1810.
Le vendeur est dit nous déclarer que les titres de propriété concernant le domaine de Puipastrop ont été remis au sieur Jean-Claude Quéron, acquéreur de ce domaine, lequel s’est obligé à en donner communication à M. Mimaud-Grandchamp toutes les fois que celui-ci en aura besoin.
Ces documents démontrent que l’antique famille Jay posséda longtemps Boisseguin, puis vers 1600 vendit ce domaine aux Volvire et acheta Puipastrop. Elle demeura en possession de ce dernier fief jusqu’en 1783 où Joseph Henri Bouchard d’Esparbès de Lussan, héritier par sa mère de la famille Jay, vendit à son tour Puipastrop à César-Louis de Choiseul-Praslin, déjà en possession du domaine de Boisseguin par alliances et héritages des Durfort de Lorges, qui eux-mêmes, le tenaient des Volvire.
Ces terres passèrent par héritage à Madame Sigismonde-Charlotte-Laure d’Hautefort, une des petites-filles de Madame de Choiseul-Praslin. Après son mariage avec le baron de Damas, ils vendirent ces terres en détail vers 1827.
Un sieur Jean-Claude Queron fut acquéreur du domaine de Puipastrop; il le garda peu de temps et le vendit à la famille d’Hémery, qui le possède encore en la personne de Madame de Montjou, née d’Hémery.

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